dimanche, janvier 30, 2011

Comme si un seul Ghannouchi ne suffisait pas !


Pour les non arabophones, la pancarte dit :
"C'est mon identité, ma liberté (sic), mon avenir"
Tunis, le 21-01-2011

En ce dimanche saint de l'an de grâce deux mil onze la Tunisie accueillait triomphalement le dit Cheik (ex-Emir) Rached Ghannouchi grand manipulateur devant l'Eternel ! N'avait-il pas dit en 1988 : "J'ai toute confiance en Dieu et en Ben Ali" ? Il l'avait d'ailleurs soutenu pendant la présidentielle de 1989 et aurait même négocié en secret, avec un certain Moncer Rouissi, l'éventualité d'une union nationale avec le RCD !

L'opportunisme de R. Ghannouchi se conjugue désormais à une patiente quête du pouvoir. Car l'homme est assez intelligent et a trop attendu pour se précipiter la tête la première dans des déclarations du genre "je serai candidat aux prochaines présidentielles". Il préfère tâter le terrain, jauger sa popularité après 20 ans d'exil. Il sait que son heure viendra ; et puis si ce n'est pas lui qui en profite, autant ne pas saborder les chances de son parti ! Il sait toutefois qu'il a une solide base très mobilisable et de nombreux "indécis" qui peuvent basculer de son côté. Il a enfin l'avantage d'avoir, contrairement à l'écrasante majorité des autres formations politiques, un positionnement très clair et un programme facilement "empaquetable" pour séduire le citoyen bêta.

Le péril vert est en marche. Les forces démocratiques doivent se mobiliser afin d'orienter la constitution en genèse vers une mise en place et une protection effective des principes républicains et laïques qui doivent présider à la vie socio-politque du pays. Il faut instaurer des garde-fous qui empêcheraient l'instauration d'une nouvelle dictature et de nouvelles restrictions des libertés. La plus grande vigilance est de mise sinon l'euphorie révolutionnaire risque de se terminer en gueule de bois !

vendredi, janvier 28, 2011

Un Jouini peut en cacher un autre !

Lorsque le Premier ministre a annoncé la composition du nouveau gouvernement de transition, j'ai eu l'agréable surprise de constater qu'il a enfin fait appel à des compétences tunisiennes reconnues qui font depuis longtemps les beaux jours d'institutions étrangères. Le meilleur symbole de ces profils exceptionnels qui manquaient à la Tunisie est incarné par Elyes Jouini dont l'ascension fulgurante l'a mené à la vice présidence de l'Université Paris-Dauphine et qui, rappelons le, a décroché en 2005 le prix du meilleur jeune économiste de France. Il a par ailleurs été administrateur de la Banque de Tunisie jusqu'à ce que la BT soit l'abbréviation de Belhassen Trabelsi et que feu Faouzi Bekahia soit remplacé par Alya Abdallah.

Le casting proposé par Ghannouchi est enfin à la hauteur des attentes de l'opinion publique avec de nombreux technocrates jouisant d'une solide réputation. Seuls Afif Chalbi et Nouri Jouini restent rescapés de l'ère Ben Ali. Le maintien du deuxième me laisse toutefois dubitatif au vu de son CV : conseiller de Ben Ali de 1996 à 2001, secrétaire d'Etat chargé de la privatisation de 2001 à 2002 et depuis cette date ministre du développement en charge notamment du développement régional ! Sans oublier qu'il avait sous sa coupe l'appareil statistique via l'Institut National de la Statistique. Même s'il a "les mains propres", sa compétence en tant que planificateur et superviseur du "modèle de développement tunisien" lui font supporter une bonne part de responsabilité dans l'échec du dit modèle, particulièrement en ce qui concerne le déséquilibre de développement régional.

Il est toutefois rassurant de savoir que désormais Elyes Jouini sera chargé des réformes économiques et sociales et de la coordination avec les ministères concernés ; en espérant qu'il aura le temps et les coudées franches afin d'impulser une vision novatrice qui mette l'économie nationale sur les bons rails.

mardi, janvier 25, 2011

Les bobos sont dans la rue...


Aujourd'hui avait lieu une manifestation de pro-gouvernementaux ou, pour préciser, de ceux qui manifestaient contre les manifestants ! Ils réclamaient un rapide retour à des rythmes scolaire et professionnel normaux. Que cela se fasse avec ce gouvernement ou un autre, la plupart s'en souciait peu... à la limite certains devaient regretter une époque pas si lointaine où l'ordre régnait en maître ! Ceux qui voulaient retourner au travail... ont un travail !! Pour beaucoup d'entre eux il faut bien payer l'école privée et les cours particuliers des enfants, la voiture populaire de madame et le crédit de l'appartement. Bien sur il y a aussi quelques pauvres ouvrières qui veulent retrouver au plus vite leur usine et toucher le salaire de misère qui assure le minimum de subsistance à leur petite famille.

A l'opposé, ceux qui squattent à la Kasbah sont ceux-là mêmes qui n'ayant plus rien à perdre ont payé le plus lourd tribu à l'insurrection des régions du Centre qui s'est transformée par leur courage en cette révolution que tout le monde cherche aujourd'hui à récupérer. C'est cette crainte de se voir une nouvelle fois floués qui pousse les protestataires à exiger un gouvernement qui leur inspire plus de confiance. Ils ne veulent plus de ces ministres qui ont si peu fait pour eux durant des années. Et il n'y a pas que les ministères dits de souveraineté ! La politique industrielle et la politique de développement économique reste au mains des mêmes ministres qui ont failli à promouvoir une répartition plus équitable des fruits de la croissance durant la dernière décennie. Ils ne se sont pas trop ému du sort que pouvait connaître ces populations laissées pour compte. Pourtant les chiffres officiels du chômage dans ces régions étaient très alarmistes depuis des années déjà : de nombreuses délégations des gouvernorats du Centre et du Sud affichaient des taux de chômage frisant voire dépassant les 50 %, trois fois le taux national !! Une véritable poudrière en puissance qui n'attendait que l'étincelle allumée par Bouaazizi paix à son âme.

Alors ces gens sont venus manifester devant les bureaux du Premier ministre pour lui dire qu'ils ne veulent plus de ceux qui les ont si longtemps ignoré. Ils sont venus lui dire aussi qu'ils veulent quelques représentants de leurs régions dans le gouvernement transitoire car celui-ci contient trop d'hommes du passé, trop d'hommes du littoral qui s'est accaparé l'économie du pays. Ils sont simplement venus lui dire qu'ils veulent espérer !

La balle est dans le camp du gouvernement. Comme je l'ai dit dans le post précédent, l'intérêt de la Nation prime sur tout ! Il faut donner des signes rassurants aux populations des régions délaissées car c'est elles qu'il faut convaincre. Il faut s'assurer de leur confiance pour que le gouvernement de transition et les commissions d'enquête indépendantes puissent travailler dans de bonnes conditions durant les mois à venir. Car il ne faut pas se leurrer, cette période ne verra pas s'améliorer de façon notable les conditions de vie à Sidi-Bouzid ou à Kasserine ! D'ailleurs, cela ne fait même pas partie des attributions d'un gouvernement de transition censé gérer les affaires courantes et préparer le passage à un régime démocratique. Néanmoins, les mesures d'aide d'urgence aux victimes, aux sinistrés et aux diplômes chômeurs vont dans le bon sens, celui de l'apaisement. Un remaniement ministériel qui prendrait en compte les revendications des opposants au gouvernement finirait de sceller un climat de confiance qui serait le corollaire de la stabilité dont a besoin le pays pour mener à bien sa transition vers une véritable démocratie tout en préservant ses intérêts économiques.

lundi, janvier 24, 2011

A beau mentir qui vient de loin !

Faut il avoir confiance en Ghannouchi ? Depuis, une semaine qu'il est sur le devant de la scène, le premier ministre-président est loin de faire l'unanimité. Nombreux sont ceux qui le découvrent alors qu'il est premier ministre depuis plus de 11 ans et ministre depuis octobre 1987 dans le gouvernement d'un certain Zine el Abidine Ben Ali. L'homme a toujours été discret et peu enclin à la communication, des qualités très appréciées par l'Omniprésident déchu et qui continuent d'être à son avantage aujourd'hui. Pour beaucoup, les succès économiques de la Tunisie sont à mettre au compte de Ghannouchi alors que la corruption et les malversations étaient uniquement le fait de Ben Ali et ses proches. Mais pouvait-il ne rien savoir ? Il a bien dit que son rôle de premier ministre s'arrêtait à la coordination et qu'il a songé maintes fois à démissionner. Pourtant, pour qui sait comment fonctionnait l'Administration sous Ghannouchi, les ministres étaient pour la plupart des super-secrétaires d'Etat qui rendaient compte au premier ministre et au Président. D'ailleurs, quand les ministres changeaient on gardait généralement le même cabinet ministériel dont le chef était souvent directement désigné par le premier ministère.

Avant la chute de Ben Ali, l'atmosphère au sein de l'Administration était devenue irrespirable. Les fonctionnaires, loin d'espérer un miracle tel que celui du 14 janvier même dans leurs rêves les plus fous, n'avaient plus qu'un souhait : un véritable remaniement ministériel qui sort du traditionnel jeu de chaises musicales. L'attente devenait pesante depuis les présidentielles de 2009 : on attendait un changement de premier ministre et de nouvelles têtes ! Alors nul besoin de dire que la déception était grande de voir qu'au lendemain de la destitution de Ben Ali on continuait avec une équipe gouvernementale largement basée sur des personnalités de l'ancien régime avec à leur tête l'inamovible Ghannouchi. Il n'a pas hésité à confirmer, voire à faire appel, à des ministres et secrétaires d'Etat dont l'implication dans des malversations administratives (attributions de marchés, gestion de biens publics, fiscalité...) ne laisse que peu de doutes. La bouffée d'oxygène tant espérée se fera donc encore attendre !

Pouvait-on faire autrement ? Personne ne peut contester qu'il n'est pas dans l'intérêt du pays qu'une situation de vacance du pouvoir se prolonge. La constitution d'un gouvernement transitoire devait se faire dans l'urgence et il était difficile de mettre tout le monde d'accord. Toutefois, il ne fallait pas être devin pour savoir que l'actuelle équipe serait très contestée. A mon humble avis, un gouvernement de salut national resserré s'imposait. La pléthore de ministres et de secrétaires d'Etat peut donner le mauvais signal que le gouvernement provisoire a vocation de durer. Par ailleurs, certains ministres confirmés dans leur postes et ayant géré des dossiers ''sensibles'' en matière de fiscalité, d'attribution de marchés publics ou de politique de développement concentrent les soupçons (fondés ou infondés) quant à la possibilité de dissimulation ou de destruction de preuves qui entraverait le bon fonctionnement des commissions d'enquête indépendantes. L'argument que ces ministres disposent d'une large expérience qui rend difficile leur remplacement ne tient pas du tout ! S'il est un poste hautement technique et sensible c'est bien celui de Gouverneur de la banque centrale. Pourtant on n'a eu aucun problème à trouver le bon remplaçant en la personne de M. Mustapha Kamel Ennabli qui aurait fait, soit dit en passant, un excellent premier ministre faisant l'unanimité parmi l'opinion publique et les investisseurs aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur. Alors qu'on ne vienne pas nous dire que certains ministères ''techniques'' sont difficiles à combler ! La Tunisie manquerait-elle de compétences en économie, en finance ou en gestion ?!

Toujours à mon humble avis, il n'est pas trop tard pour désamorcer l'actuelle crise gouvernementale. L'interêt suprème du pays exige que tout le monde se mette au travail, le gouvernement et les commissions d'enquête en tête ! Alors pourquoi ne pas maintenir Ghannouchi, qui avec M. Mbazaa assurent le lien constitutionnel, et changer tous les autres ministres pour couper court à la polémique en les remplaçant par des personnalités intègres (peu importe le bord politique). Les commissions d'enquête travailleraient alors avec plus de sérénité et feraient la lumière sur l'implication ou non des anciens membres du gouvernement !

mardi, janvier 18, 2011

Marzouki est rentré... mais pas son site !

Ammar n'est pas encore au chomage à ce qui me semble ! Je n'arrive pas à accéder à www.moncefmarzouki.net ni au cache de google...

Deux ans !

Oui, deux ans de silence... Ulysse n'était plus heureux au "pays du bonheur éternel" et ne croyait plus tellement à l'expression alternative sans cesse muselée par Ammar et ses acolytes ! Mais c'était sans compter avec ce vent de colère venu des terres les plus reculées porté par la volonté des hommes libres (n'est ce pas ainsi que les berbères aiment se désigner ?). Alors aujourd'hui je peux de nouveau paraphraser Darwish : "sur cette terre, il y a ce qui mérite de vivre " !

Merci à tous ceux qui ont sacrifié leur vie pour qu'on puisse de nouveau respirer.