Aujourd'hui avait lieu une manifestation de pro-gouvernementaux ou, pour préciser, de ceux qui manifestaient contre les manifestants ! Ils réclamaient un rapide retour à des rythmes scolaire et professionnel normaux. Que cela se fasse avec ce gouvernement ou un autre, la plupart s'en souciait peu... à la limite certains devaient regretter une époque pas si lointaine où l'ordre régnait en maître ! Ceux qui voulaient retourner au travail... ont un travail !! Pour beaucoup d'entre eux il faut bien payer l'école privée et les cours particuliers des enfants, la voiture populaire de madame et le crédit de l'appartement. Bien sur il y a aussi quelques pauvres ouvrières qui veulent retrouver au plus vite leur usine et toucher le salaire de misère qui assure le minimum de subsistance à leur petite famille.
A l'opposé, ceux qui squattent à la Kasbah sont ceux-là mêmes qui n'ayant plus rien à perdre ont payé le plus lourd tribu à l'insurrection des régions du Centre qui s'est transformée par leur courage en cette révolution que tout le monde cherche aujourd'hui à récupérer. C'est cette crainte de se voir une nouvelle fois floués qui pousse les protestataires à exiger un gouvernement qui leur inspire plus de confiance. Ils ne veulent plus de ces ministres qui ont si peu fait pour eux durant des années. Et il n'y a pas que les ministères dits de souveraineté ! La politique industrielle et la politique de développement économique reste au mains des mêmes ministres qui ont failli à promouvoir une répartition plus équitable des fruits de la croissance durant la dernière décennie. Ils ne se sont pas trop ému du sort que pouvait connaître ces populations laissées pour compte. Pourtant les chiffres officiels du chômage dans ces régions étaient très alarmistes depuis des années déjà : de nombreuses délégations des gouvernorats du Centre et du Sud affichaient des taux de chômage frisant voire dépassant les 50 %, trois fois le taux national !! Une véritable poudrière en puissance qui n'attendait que l'étincelle allumée par Bouaazizi paix à son âme.
Alors ces gens sont venus manifester devant les bureaux du Premier ministre pour lui dire qu'ils ne veulent plus de ceux qui les ont si longtemps ignoré. Ils sont venus lui dire aussi qu'ils veulent quelques représentants de leurs régions dans le gouvernement transitoire car celui-ci contient trop d'hommes du passé, trop d'hommes du littoral qui s'est accaparé l'économie du pays. Ils sont simplement venus lui dire qu'ils veulent espérer !
La balle est dans le camp du gouvernement. Comme je l'ai dit dans le post précédent, l'intérêt de la Nation prime sur tout ! Il faut donner des signes rassurants aux populations des régions délaissées car c'est elles qu'il faut convaincre. Il faut s'assurer de leur confiance pour que le gouvernement de transition et les commissions d'enquête indépendantes puissent travailler dans de bonnes conditions durant les mois à venir. Car il ne faut pas se leurrer, cette période ne verra pas s'améliorer de façon notable les conditions de vie à Sidi-Bouzid ou à Kasserine ! D'ailleurs, cela ne fait même pas partie des attributions d'un gouvernement de transition censé gérer les affaires courantes et préparer le passage à un régime démocratique. Néanmoins, les mesures d'aide d'urgence aux victimes, aux sinistrés et aux diplômes chômeurs vont dans le bon sens, celui de l'apaisement. Un remaniement ministériel qui prendrait en compte les revendications des opposants au gouvernement finirait de sceller un climat de confiance qui serait le corollaire de la stabilité dont a besoin le pays pour mener à bien sa transition vers une véritable démocratie tout en préservant ses intérêts économiques.
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